J.O. 101 du 29 avril 2006
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Avis relatif au projet d'arrêté modifiant l'arrêté du 16 juin 2005 relatif aux prix de vente du gaz combustible vendu à partir des réseaux publics de distribution
NOR : INDI0607339V
Le 19 avril 2006, la Commission de régulation de l'énergie a été saisie, en application de l'article 7 de la loi du 3 janvier 2003, par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, d'un projet d'arrêté modifiant l'arrêté du 16 juin 2005 relatif aux prix de vente du gaz combustible vendu à partir des réseaux publics de distribution.
1. L'arrêté du 16 juin 2005
Dans sa version initiale, l'arrêté du 16 juin 2005 fixait pour Gaz de France, jusqu'à la fin de l'année 2007, les modalités d'évolution des tarifs de vente de gaz combustible en distribution publique. Son objectif principal était d'apporter de la visibilité et de la sécurité sur les évolutions de ces tarifs.
Il permettait l'application de l'article 7 de la loi du 3 janvier 2003, qui dispose que « les tarifs de vente du gaz naturel aux clients non éligibles sont définis en fonction des caractéristiques intrinsèques des fournitures et des coûts liés à ces fournitures. Ils couvrent l'ensemble de ces coûts à l'exclusion de toute subvention en faveur des clients éligibles. ».
2. Le projet d'arrêté modificatif
Pour les tarifs réglementés de Gaz de France, le projet d'arrêté modificatif :
- fixe une hausse de 0,21 c/kWh, au 1er mai 2006, de la part des tarifs correspondant aux coûts d'approvisionnement ;
- supprime la mention de la fréquence trimestrielle de révision des tarifs.
Le projet d'arrêté ne change pas les dispositions prévues par l'arrêté du 16 juin 2005 en ce qui concerne l'évolution des tarifs réglementés des distributeurs non nationalisés.
3. Observations de la CRE
3-1. Application des règles
L'arrêté du 16 juin 2005 prévoit une révision des tarifs de vente de gaz naturel en distribution publique de Gaz de France au 1er avril 2006. Cette disposition n'a pas été respectée.
3-2. Evolution des coûts
Evolution des coûts d'approvisionnement
Le calcul de l'évolution des coûts d'approvisionnement, conformément à l'article 4 de l'arrêté du 16 juin 2005, à partir des moyennes des cours d'un panier de produits pétroliers et du taux de change de l'euro par rapport au dollar US sur les six mois précédant le mois d'avril 2006, conduit à une hausse de 0,193 c/kWh.
La dernière part du rattrapage résultant de la répercussion incomplète des coûts d'approvisionnement lors du mouvement de novembre 2004 implique une hausse supplémentaire de 0,04 c/kWh.
Il en résulte une hausse des tarifs au 1er mai 2006 de 0,233 c/kWh, ce qui correspond à une augmentation moyenne de la facture client de 6,2 % (5,6 % pour les particuliers se chauffant au gaz, tarif B1).
Evolution des coûts hors approvisionnement
Gaz de France demande que soient prises en compte des charges nouvelles hors coûts d'approvisionnement. En réponse à la demande de la CRE du 16 juin 2005 de mise en place d'une comptabilité analytique, Gaz de France a transmis très récemment à la commission les premiers éléments d'une décomposition analytique des coûts de l'activité de fourniture réglementée de gaz naturel. Celle-ci devra être complétée par l'opérateur et faire l'objet d'un audit par la CRE. En l'état, les charges nouvelles hors coûts d'approvisionnement ne peuvent être évaluées avec suffisamment de précision et, donc, retenues.
3.3. Autres montants de charges restant à couvrir
Selon Gaz de France, les autres montants de charges restant à couvrir s'élèveraient, au 1er mai 2006, à environ 970 M. Cette somme se décompose en :
810 M, résultant des augmentations de tarifs non réalisées depuis 2004 ;
160 M, résultant des mesures commerciales prises par Gaz de France en faveur des consommateurs relevant du tarif B1 pendant l'hiver 2005-2006.
L'audit de la CRE sur les coûts d'approvisionnement de Gaz de France, dont les conclusions ont été rendues publiques le 28 février 2006, a montré, pour les années 2003 à 2005, un écart de 240 M entre le montant résultant de la formule d'approvisionnement et le total des coûts d'approvisionnement constatés. L'écart total est estimé pro rata temporis à 270 M.
Les autres montants de charges restant à couvrir au 1er mai 2006 s'élèveraient ainsi à 700 M.
3.4. Impact sur le fonctionnement et l'ouverture des marchés
Le projet d'arrêté, en prenant en compte les évolutions des prix d'approvisionnement en gaz, devrait avoir un effet favorable à court terme sur le fonctionnement du marché des clients professionnels.
Toutefois, il est indispensable que la structure des tarifs soit révisée. En effet, pour éviter toute distorsion de concurrence, ces tarifs doivent refléter la vérité des coûts de l'opérateur (accès aux infrastructures, approvisionnement et commercialisation). Cette révision devrait intervenir avant l'ouverture du marché des clients résidentiels au 1er juillet 2007.
De surcroît, en supprimant la mention de la fréquence de révision des tarifs de Gaz de France, le projet d'arrêté diminue la transparence et la visibilité du dispositif pour les acteurs du marché. Dans ces conditions, le risque existe qu'une hausse importante des coûts d'approvisionnement ne soit pas répercutée dans les tarifs et que la rentabilité de l'activité de fourniture soit dégradée, voire devienne négative. La possible coexistence de tarifs réglementés ne reflétant pas les coûts et de prix de marché constitue un frein sérieux au développement des fournisseurs alternatifs.
4. Avis de la CRE
La hausse des tarifs de 0,21 c/kWh proposée dans le projet d'arrêté ne répercute pas intégralement la variation des coûts d'approvisionnement de Gaz de France. L'augmentation doit être de 0,233 c/kWh.
La hausse de 0,233 c/kWh prend en compte l'évolution des seuls coûts d'approvisionnement de l'opérateur. Si l'audit mené par la CRE sur les premiers éléments de comptabilité analytique reçus et les éléments complémentaires qui doivent être fournis par Gaz de France mettait en évidence un besoin de révision des coûts hors approvisionnement, un mouvement tarifaire devrait alors intervenir en conséquence.
Le projet d'arrêté supprime, avant même sa mise en oeuvre, la règle d'évolution périodique des tarifs de Gaz de France établie par l'arrêté du 16 juin 2005. Plus encore, il ne la remplace pas. Ce projet diminue la transparence et la visibilité du dispositif pour les fournisseurs et les clients. Cette instabilité du cadre réglementaire nuit au bon fonctionnement du marché.
Afin d'éviter toute distorsion de concurrence sur le marché des clients professionnels et dans la perspective de l'ouverture du marché des clients résidentiels, la CRE rappelle la nécessité de réviser la structure des tarifs de vente réglementés avant le 1er juillet 2007, pour refléter la vérité des coûts.
En conséquence, la CRE émet un avis défavorable sur le projet d'arrêté qui lui est soumis.
Fait à Paris, le 28 avril 2006.
Pour la Commission de régulation de l'énergie :
Le président,
P. de Ladoucette